Le plus grand aéroport international londonien est depuis longtemps en lutte auprès des pouvoirs publics britanniques avec l’objectif d’agrandir la superficie de la zone aéroportuaire et moderniser ses équipements.
En l’état actuel avec seulement deux pistes, Heathrow est un aéroport en situation de saturation intégrale vu le nombre de mouvements rapportés aux infrastructures disponibles.
Mais Heathrow entend changer cette situation. Pour ce faire, la société aéroportuaire a mis en place une vaste campagne de lobbying « It’s time for Heathrow » en mettant à contribution les passagers qui avaient, comme bien souvent, compris depuis longtemps que la situation devait changer.
Un plan ambitieux.
Le plan d’Heathrow est composé de plusieurs points.
- Heathrow East.
Dans un premier temps le Terminal 2 « Queen’s terminal » pourrait être agrandi pour former un pôle « Heathrow East » en le liant avec le Terminal 3 vu la proximité de ces deux bâtiments, bel et bien situés à l’est de la plateforme.
Ce lien entre T2 et T3 semble pourtant relativement contre-nature vu que le premier est le terminal Star Alliance et le second le terminal oneworld. Dans ce contexte, c’est davantage un lien entre les satellites du Terminal 5 et ceux du Terminal 3 qui serait logique.
Quoiqu’il en soit ces nouveautés s’accompagneraient d’efforts importants en matière d’hôtellerie et de commerces ainsi qu’un nouveau système ferré pour faciliter les transits.
- Heathrow West et un terminal 6.
A l’ouest, du nouveau également ! Le projet vise à lier le Terminal 5 actuel avec un nouveau Terminal 6 ainsi que la construction de satellites.
Les projets imaginés par Grimshaw Architects pour le Terminal 6 ont fière allure !
Le Terminal 5 ne serait d’ailleurs pas en reste avec une refonte de sa desserte ferrée et routière afin d’augmenter de 60% la part des voyageurs qui se rendront à l’aéroport en transports en commun.
- Une nouvelle piste ?
Mais le plus important, c’est que ce T6 serait directement accolé à l’objet de toutes les tensions depuis une quinzaine d’années à Londres : la construction d’une troisième piste. Si Heathrow le minimise, c’est bien cet élément qui est, de loin, le plus important du projet !
Mais l’aéroport semble avoir tout prévu en matière de communication puisqu’il indique que grâce à un système de roulement entre les différentes pistes ainsi que des tracés d’approches remaniés, ce sont 200 000 riverains de moins qu’actuellement qui seraient touchés par les nuisances sonores.
Un absent remarqué !
Dans tout ce projet un terminal ne fait jamais parler de lui : le T4. Hôte des compagnies SkyTeam, Etihad Partners et beaucoup de compagnies sans alliances, celui-ci n’est jamais mentionné, et c’est tout juste si il est figure sur les vues 3D du projet…
Un rival : Gatwick.
Derrière cette grande opération de séduction se cache une grande rivalité : celle de Heathrow contre Gatwick, l’autre aéroport londonien.
Celui-ci est, à l’image de son adversaire, pleinement entré en campagne dans le but de faire pencher les pouvoir publics en faveur de son projet de construction d’une seconde piste d’atterrissage associé à la création d’un nouveau terminal.
Ce projet, qui semble bien moins en cohérence avec la réalité des opérations aériennes londoniennes, illustre bien la nécessité d’expansion. Il n’est d’ailleurs pas surprenant de voir renaître ces vieux marronniers, de part et d’autre, alors que le « 10, Downing Street » vient de changer de locataire.
Si l’un comme l’autre ont peu de chance d’aboutir, il se dit que Theresa May pourrait être moins fermée que son prédécesseur à la réalisation effective de ces projets, même si le nouveau maire de Londres Sadiq Khan a publiquement fait savoir qu’il penchait en faveur du projet de Gatwick. Un positionnement très politique qui ne surprend pas, vu que les nuisances que celui-ci engendrerait concerneraient bien moins directement ses propres administrés.
La guerre des aéroports ne fait que (re-) commencer !
Conclusion.
Ce qui fait plaisir du point de vue de l’expérience passagers avec ce plan de rénovation et d’expansion d’Heathrow, c’est le constat que l’aéroport a pris le parti de ses clients. Plutôt que de se cantonner à invoquer le manque de complaisance des pouvoirs publics, même si elle a aussi largement su le faire par le passé, la société a voulu mettre en place une (énième) campagne ambitieuse en assumant pleinement ses prises de positions tout en sollicitant ceux qui sont directement impactés : les voyageurs.
Une leçon à méditer.