L’équipementier français Zodiac Aerospace avait fait sensation quand, en début d’année, était révélée son future acquisition par l’industriel à succès Safran.
Ensemble, les deux groupes s’étaient promis un avenir radieux, bien que leurs coeur de métier soient si distants l’un de l’autre – à l’image d’ailleurs du rapprochement Rockwell – B/E Aerospace qui avait été annoncé à l’automne.
Mais ce rachat surprise n’a pas été entendu d’une oreille si positive, loin s’en faut, par les actionnaires de Safran. Regroupés autour de l’anglais faiseur de Rois Christopher Hohn, le président du fond TCI, une action publique, juridique, et politique de très grande ampleur allait bientôt être menée. Objectif : tuer dans l’œuf un mariage qui ne serait pas de nature à redresser les affaires de l’équipementier d’une part, et à garantir la prospérité du motoriste d’autre part.
D’un côté, cet actionnaire – pourtant minoritaire avec 4% – explique que les activités sont trop éloignées pour être conjointes et que le rachat d’action se fait à un tarif bien trop faible. Un site a d’ailleurs été créé pour l’occasion : « A Stronger Safran« .
On y retrouve l’argumentaire autour de la question de la valeur boursière de l’entreprise :
Ainsi que le constat de la situation d’activité très alarmante, notamment sur la prévision de perte de parts de marché.
Pourtant sur le plan financier le marché avait très bien accueilli la nouvelle en janvier, faisant grimper en flèche la valeur de l’entreprise. Des gains qui ont fondu lorsque s’est fait jour la volonté du fond TCI de s’opposer fermement au rachat pas Safran.
Une situation qui n’a pas été améliorée par la présentation il y a quelques jours de l’état des lieux financier du premier semestre 2016/2017 …
Zodiac Aerospace n’avait pas d’autre choix que d’assumer la baisse de son chiffre d’affaires, ainsi que l’impact sur le résultat opérationnel qui en découle :
En cause : la perte de marché effective, mais également la volonté rendue publique de Cathay Pacific de changer les cabines de certains de ses A350 par un nouveau set de sièges, certains faisant très largement défaut…
D’ailleurs, Zodiac explique clairement qu’en interne des plans B sont à l’étude pour le cas où le sauvetage par Safran, salutaire mais mis en péril, viendrait à échouer.
Zodiac sera-t-il sauvé ?
Les problèmes que rencontrent Zodiac Aerospace tiennent essentiellement du fait de la structure de la société, arrivée au bout de ses capacités de gestion. Elle n’est pas une entreprise au sens propre, mais un agrégat de multiples sociétés rachetées les unes après les autres. Aujourd’hui, la quantité de divisions et de sous-métiers qui cohabitent est impressionnante.
D’autant que ces « filiales intégrées » sont éparpillées un peu partout à travers l’Europe et les Etats-Unis. L’activité « seat » par exemple.
Même chose pour l’activité « cabine ».
Pire encore pour « Aerosystème ».
Même « Zodiac Seat France » n’est pas tellement centralisée.
Conclusion.
L’avenir est assez inquiétant car la seule planche de salut tend à s’estomper.
En effet, le président de TCI a récemment été entendu par l’AMF, le gendarme de la finance, au sujet de cette OPA qu’il considère illégale, les actionnaires n’ayant pas été consultés.
Pour Zodiac, les scénarios alternatifs sont assez inquiétants, surtout que la lente inertie du groupe à bouger dans les grande lignes a été assez contraignante ces dernières années. Qu’en sera-t-il si Safran annonce l’abandon du processus ? Qui pour s’associer à ce grand corps malade à la renverse ?
L’affaire a d’ailleurs pris une tournure politique au plus haut sommet de l’Etat, actionnaire principal de Safran, puisque François Hollande lui-même avait bruyamment exprimé, en janvier, sa bénédiction concernant ce rapprochement. Les observateurs informés savent que beaucoup, en interne, craignent que le changement de législature soit l’occasion d’enterrer définitivement les espoirs, pourtant maigres, de sauver l’un des principaux fournisseurs d’équipements aéronautiques mondiaux …
Tyler.