Première partie – Une flotte 2.0 au coeur des ambitions d’Air Tahiti Nui
Deuxième partie – Rencontre avec les artisans de la montée en gamme d’Air Tahiti Nui
Troisième partie – À bord du Tahitian Dreamliner en Business
Quatrième partie – La Premium Economy d’Air Tahiti Nui : un nouveau produit pour une nouvelle clientèle
Cinquième partie – Tahiti Nui Helicopters : la famille Air Tahiti Nui s’agrandit !
Tahiti Nui Helicopters : la famille Air Tahiti Nui s’agrandit !
En juin 2017, Tahiti Helicopters, unique entreprise de Polynésie à offrir un service d’hélicoptères civils, opérait son dernier vol après 7 ans d’activité. Faute de repreneur, la société a fermé et les hélicoptères ont été rapatriés en métropole.
Mais c’était sans compter sur la pugnacité d’Air Tahiti Nui qui, consciente du véritable besoin en Polynésie française, s’est rapprochée d’HBG, numéro 1 français du transport en hélicoptère, afin de faire naître Tahiti Nui Helicopters, filiale d’Air Tahiti Nui.
Lors de notre déplacement à Tahiti, nous avons eu l’occasion de rencontrer Laurent Touvron, l’artisan de cette renaissance dans l’archipel.
Rencontre.
The Travelers Club – Parlez nous des origines de Tahiti Nui Helicopters.
Laurent Touvron – Tout est parti de l’ancienne compagnie, Tahiti Helicopters, qui était détenue par un propriétaire privé, passionné et pilote. Il est venu en Polynésie française et avait vu que la compagnie était en vente. Il a racheté la société puisqu’il avait d’importants moyens financiers mais ses moyens n’étaient pas illimités et cette société a été contrainte de fermer ses portes après 7 ans d’exploitation. Ce propriétaire a contacté plusieurs entreprises afin de trouver des repreneurs, dont Air Tahiti Nui, mais cette proposition devait passer par notre conseil d’administration, ce qui peut prendre du temps, Ce dernier ne voulant pas attendre, Tahiti Helicopters a été fermée en 1 mois seulement après son dernier vol le 4 juin. Le 4 juillet tout était vendu, et tout était sur le point d’être rapatrié en France métropolitaine.
De son côté, Air Tahiti Nui a rencontré un autre acteur sur le marché des hélicoptères : HBG. Notre compagnie aérienne, consciente de maîtriser le secteur de l’aérien local et international mais pas celui des hélicoptères, a préféré opter pour cette rencontre. En revanche, HBG maîtrisait ce secteur d’activité mais n’avait aucune connaissance du marché de la Polynésie française. L’association entre Air Tahiti Nui et HBG est alors apparue comme logique.
Ce fût notre postula de départ, en juillet 2017. Nous avons entamé les discussion à cette période et la première signature entre nos deux sociétés est intervenue en février 2018, avec la bienveillance du gouvernement de la Polynésie française qui, avouons le, faisait pression pour qu’Air Tahiti Nui se lance dans cette aventure. Ils avaient besoin d’une société locale d’hélicoptères afin d’offrir non seulement une prestation touristique, mais aussi répondre à des besoins en cas de sinistre ou de travaux aérien, par exemple.
Nous avons officiellement lancé Tahiti Nui Helicopters le 27 mars 2018 auprès de la chambre de commerce mais nous avons eu une longue période d’attente afin que cette dernière soit intégrée au CTA de HBG. Ainsi, nous étions prêts à voler dès le 18 avril 2018 mais nous avons dû attendre le 20 juillet 2018 afin d’effectuer notre premier vol commercial. Pour vous donner un ordre d’idée, les premières machines sont arrivées vers le 15 avril 2018, près de 3 mois avant ce premier vol. De ce fait, nous avons rencontré quelques difficultés puisque la haute saison à Tahiti avait déjà débuté en juin. Nous avons donc dû contacter tous les hôtels, les différentes agences de voyage, les TO afin de lancer notre activité.
Nous sommes arrivés sur le marché avec 3 hélicoptères dont un qui nous appartiens en propre. Il s’agit d’un Ecureuil AS352B2 : un monomoteur. Les deux autres sont des EC135, bi-moteurs, destinés à des transferts intérieurs.
Nous avons, dès le départ, mis en place des missions, des vols commerciaux vers Bora Bora puis des transferts inter-îles entre Bora Bora et Tahiti. À noter que nous pouvons couvrir l’ensemble des îles de l’Archipel de la Société : facilement vers le nord-ouest, avec des arrêts si l’on va plus loin. Nous effectuons également des opérations de levage aérien, de lutte contre le feu avec des poches d’eau de 540 litres, des shootings aériens avec vidéos et photographies, ou du LIDAR (cartographie par laser, ndlr). Nous avons même eu une mission de sondage électrique du sol afin de déterminer les failles, les natures constituantes des différents terrains. Et nous pouvons faire encore de très nombreuses choses diverses.
TTC – Quelle est donc la répartition des activités entre les saisons ?
LT – Nous pouvons dire que tout le travail aérien est plutôt une activité en haute saison puisque cela coïncide avec la saison sèche. Par ailleurs, la haute saison est essentielle pour tout ce qui relève des vols commerciaux (bien que nivelés sur toute l’année). Tout le reste des activités, comme les photos, etc.., sont réparties sur toute l’année. Mais tout dépend de ce que souhaites les voyageurs.
TTC – Comment se répartissent les activités entre elles ?
LT – Nous avons sensiblement deux tiers de notre activité dédiée aux vols panoramiques. Dans ces deux tiers, les trois quarts sont basés à Bora Bora. Tahiti a toujours été considérée comme une destination très premium. L’idée est de développer le tourisme de destination à Tahiti. Nous avons trois types de circuits : 10, 20 et 30 minutes. Le plus populaire sur Tahiti demeure le 20 minutes tandis qu’il s’agit du 30 minutes sur Bora Bora puisque nous intégrons le survol de l’île de Tupai (une superbe île en forme de coeur).
Par ailleurs, nous avons deux systèmes de réservation. Le plus prisé est le système partagé : le client ne va acheter qu’une ou plusieurs places à bord d’un hélicoptères (à noter que nous déclenchons le vol qu’à partir de 4 places achetées sur une capacité de 5 sièges avec l’Ecureuil et de 6 sièges avec l’EC135). Nous essayons d’ailleurs de faire le plus de vols panoramiques avec l’Ecureuil car la bulle qu’il possède permet une vue à 180 degrés. Avec l’EC135, c’est un peu moins pratique pour la vue. Tous nos appareils sont exploités par un seul pilote. En général, on limite à 5, comme cela, tout le monde a une fenêtre.
De plus, Moorea se développe beaucoup en terme de transferts, de jour comme de nuit. Même à l’arrivée des avions d’Air Tahiti Nui à 21h les clients sont à Moorea à leur hôtel à 23h. Sachant qu’il y a plus de bateau à partir de 19h, c’est une alternative très pratique. On récupère quelque fois des gens qui ont loupés leur bateau. Quant au prix, c’est 805 EUR la traversée, jusqu’à 5 passagers avec bagages : un transfert forcement privé. Nous avons envisagé des vols réguliers, mais pour cela nous nous devons de devenir IATA et ce n’est pas notre priorité du moment. Nous sommes VFR uniquement donc en cas de mauvais temps, ce serait compliqué. Dans tous les cas, de nuit, l’InterContinental et le Sofitel ne nous permettent pas de nous poser. La construction de zones spécifiques, accessibles, est à l’étude. Pour l’instant, rien ne presse. Il ne faut d’ailleurs pas oublier la problématique du bruit.
À terme, avoir une quatrième machine, avec un radar météo, nous permettant des vols aux instruments, etc… est un projet. Il n’y a qu’une seule station météo dans la région, celle de Tahiti. On ne prend jamais de risque. Et quand nous sentons que le temps n’est pas assez bon, nous préférons ne pas effectuer le vol.
TTC – Avez-vous déjà une idée de la quatrième machine et de vos futurs projets ?
LT – Nous avons déjà fait quelques études en interne et cette machine pourrait être de l’EC155, voir le Dauphin car ils sont multi-missions. Sur le toit de l’hôpital, la charge maximale est de 4T3. Le Dauphin est donc le plus adapté. Nous avons des discussions avec la sécurité sociale locale pour faire des permanences mais cela nous coûterait très cher puisqu’il faudrait recruter 5 personnes rendant la masse salariale considérable. Ici, on applique le code du travail avec 39 heures de base et 9 heures supplémentaires maximum. Pas plus de 6 jours d’affilés.
L’hélicoptère basé à Bora Bora revient régulièrement à Tahiti pour les activités de maintenance. HBG nous soutient en terme technique et opérationnel. Air Tahiti Nui nous soutient sur le plan commercial et marketing. Ce sont les équipes d’Air Tahiti Nui qui nous ont aidé à monter notre réseau informatique. Nous sommes basés de l’autre côté de la piste. On a pas vraiment de bureaux ni de comptoirs en ville. J’aimerais vraiment capter les croisiéristes car il y en a beaucoup qui font escales à Tahiti. De ce fait, il faudrait que l’on trouve un lieu où poser les hélicoptères en ville afin de leur éviter d’aller à l’aéroport pour faire leur tour. Pour l’instant cela ne marche pas mais nous avons d’autres idées dont une plateforme flottante. La simplification du parcours client est cruciale pour notre activité.
Sur Bora Bora tout est bien installé et organisé. Il existe un fort partenariat avec le Brando, un formidable hôtel de luxe de la région. La clientèle est là. Nous, il faut juste que nous les amenions d’un point A à un point B. Par exemple, lorsque le voyageur est à Bora Bora et qu’il veut aller à Taha’a, cela prend 10 minutes à peine en hélicoptères tandis qu’en avion ou en bateau cela prend plusieurs heures.
L’inconvénient de la Polynésie française, c’est que c’est une niche. Mais il est possible de survivre puisqu’il y a un véritable potentiel.
TTC – Existe t-il un intérêt à baser un deuxième hélicoptères à Bora Bora ?
LT – C’est envisageable, bien entendu. Mais il nous manque l’emplacement pour pouvoir stationner ce deuxième hélicoptère. Nous cherchons actuellement des solutions dont son installation à l’aéroport. Par ailleurs, nous avons le projet d’installer une troisième base aux Marquises, à la demande du gouvernement.
TTC – Quel est le soutien financier d’Air Tahiti Nui ?
LT – Tous les actionnaires ont fourni une somme à la création de la compagnie. Ce n’est pas de l’argent de poche. Pour le moment, les résultats ne sont pas très bons mais Air Tahiti Nui ne nous laissera pas mourir. Le but est que nous devenions rentables assez rapidement même si, pour l’heure, nous en sommes encore loin. Notre business plan prévoit l’équilibre à 400 heures de vol par hélicoptères et par an. Pour l’instant, nous l’effectuons en 18 mois. Malheureusement nous sommes actuellement à un tiers de la capacité de vol de nos hélicoptères.
TTC – Des promotions en cours ? Ne serait-ce que pour les clients d’Air Tahiti Nui ?
LT – Oui, nous avons fait une promotion pour les passagers en provenance de la France, de l’Italie et de l’Espagne avec Air Tahiti Nui. Ce sont des leviers qui vont faire connaître le produit et cela favorise l’effet groupe. En disant « si vous volez avec nous, vous avez un avantage », c’est toujours positif. Outre ce partenariat avec Air Tahiti Nui, notre maison-mère, nous avons également développé un autre partenariat avec un site de réservation d’hébergement : Booking.com. Nous essayons d’apporter une vraie cohérence globale au produit.
Vol panoramique en vidéo.
Album photos.
Crédit photos : The Travelers Club