Le conseil de surveillance de Lufthansa s’est réuni aujourd’hui afin de discuter des conditions du prêt du gouvernement allemand devant permettre à cette dernière d’éviter la faillite à plus ou moins long terme. Le conseil a, en définitive, conclu qu’il lui fallait davantage de temps afin d’examiner les exigences fixées par la Commission européenne. L’approbation ne sera donc pas effective ce jour comme prévu initialement. En effet, le prêt de 9 milliards d’euros, discuté la semaine passée entre le gouvernement allemand et la compagnie aérienne, a été assortis hier de conditions supplémentaires fixées par la Commission européenne. Conditions que le conseil de surveillance désapprouve, pour l’instant.
L’aide de l’Allemagne négociée avec Lufthansa.
La semaine dernière, un accord a été trouvé entre la direction de Lufthansa et l’Allemagne. Celui-ci devait permettre à la compagnie aérienne allemande de recevoir une aide financière de plus de 9 milliards d’euros.
Ainsi, avec cet accord, l’État allemand devait recevoir 20% des titres de la compagnie aérienne (Deutsche Lufthansa AG) et 5% sous forme d’obligations convertibles (il s’agit d’une obligation à laquelle est attaché un droit de conversion qui offre à son porteur, l’Allemagne en l’occurence, le droit d’échanger l’obligation en actions de Lufthansa, selon une parité de conversion déjà préfixée, et dans une période future prédéterminée, ndlr).
Lufthansa devait recevoir, en outre, un prêt garanti de 3 milliards d’euros (inclu dans le soutien globale de 9 milliards d’euros) pour s’assurer de liquidités supplémentaires afin d’accompagner sa reprise (le reste étant une participation silencieuse remboursable à l’horizon 2024).
Mais ce n’est pas tout.
L’accord prévoyait également que l’Allemagne pourrait nommer 2 membres au Conseil de Surveillance de la compagnie aérienne afin de contrôler sa bonne gestion. Nommés par le gouvernement allemand, ces membres seront, en théorie, non politisés, mais seront issus du monde des affaires, avec une carrière exemplaire.
Jusqu’à présent, l’accord avait été passé entre la direction de Lufthansa et le gouvernement allemand uniquement.
Son entrée en vigueur était soumise à 2 conditions :
- l’accord de l’Union Européenne (qui avait validé un accord sensiblement similaire au groupe Air France – KLM récemment)
- l’accord des actionnaires actuels de Lufthansa
Avec cet accord, l’État allemand devait faire l’acquisition des titres de la compagnie aérienne à un tarif très avantageux.
Les deux conditions étant cumulatives, aussi bien l’Union Européenne que l’Assemblée des actionnaires devait donner leur accord pour que la mise en oeuvre de l’accord soit possible.
Sans ce soutien financier conséquent, Lufthansa pourrait être confronté à une mise en faillite à plus ou moins long terme.
Le rejet du conseil de surveillance de Lufthansa suite à la proposition de la commission européenne.
S’il a été reconnu que l’accord négocié entre Lufthansa et l’Allemagne est, actuellement, la seule alternative viable pour maintenir la solvabilité de la compagnie aérienne et que son refus maintiendrait cette dernière dans une situation économique très difficile, le conseil de surveillance n’a pas été en mesure d’approuver aujourd’hui l’offre du gouvernement, assortie par ailleurs des conditions supplémentaires fixées par la Commission européenne.
Contrairement à ce qui avait été envisagé initialement, ce n’est pas la prise de participation temporaire à hauteur de 20% par l’Allemagne qui a posé problème au conseil de surveillance de Lufthansa. En effet, ce dernier à considéré que, compte tenu des tendances politiques du pays, l’absence d’interventionnisme dans la gestion de la compagnie aérienne serait de mise.
C’est bel et bien les conditions imposées par la Commission européenne qui ont aujourd’hui posé problème au conseil.
Pour mémoire, afin de lutter contre la concurrence déloyale au sein des pays de l’Union Européenne, les mesures de soutien étatique auprès d’une entreprise privée, même si les règles ont été assouplies en raison du coronavirus, sont toujours mal accueillies par la Commission.
Ainsi, et en échange de l’approbation de cet accord, la Commission européenne a exigé que Lufthansa cède un certain nombre de ses droits de trafic, aux aéroports principaux de Francfort et de Munich, afin de maintenir une concurrence jugée suffisamment loyale pour les autres acteurs de l’industrie.
Pour Lufthansa, se conformer à cette demande de l’Union Européenne reviendrait à affaiblir ses deux principaux hubs portant ainsi un important préjudice économique sur l’entreprise et aurait un impact non négligeable sur le remboursement futur de l’aide publique.
Le Conseil a donc, ce soir, dû sursoir à statuer dans l’attente de réévaluer la proposition ultérieurement
Conclusion.
L’aide allemande est une nécessité pour Lufthansa. Aussi bien le conseil de surveillance de la compagnie aérienne que la Commission européenne l’ont compris.
Néanmoins, Lufthansa devra faire des concessions si elle souhaite percevoir cette aide de 9 milliards d’euros (dont 3 milliards prennent la forme d’un prêt garanti).
La Commission européenne a des exigences que le conseil de surveillance de la compagnie n’est, pour l’heure, pas prêt d’accepter.
On assiste donc à un retour évident aux négociations dans l’attente d’une solution pérenne !
Tyler.