C’est une décision sans surprise, mais lourde de sens : Qatar Airways a discrètement annulé sa commande de Boeing 737 MAX 10. Confirmée par son Président-directeur général, Badr Mohammed Al Meer, dans un entretien à Bloomberg, cette décision marque la fin d’un épisode diplomatico-industriel tendu entre la compagnie du Golfe et les deux géants de l’aéronautique mondiale. Plus encore, elle souligne la montée en puissance stratégique de la famille A321neo au sein de la flotte de Qatar Airways.
Qatar Airways : une commande Boeing née d’un conflit, et non d’une vision long terme.
Revenons en arrière. En pleine crise avec Airbus autour de la dégradation prématurée du revêtement des A350, Qatar Airways s’est vue privée d’accès à de nouvelles commandes de monocouloirs européens. Airbus avait même annulé unilatéralement la commande de 50 A321neo, en guise de représailles.
Dans ce contexte, l’annonce surprise d’une commande ferme de 25 Boeing 737 MAX 10, assortie de 25 options, en 2022 avait été interprétée comme une manœuvre tactique, une manière pour Doha de montrer son agilité diplomatique, quitte à compromettre la cohérence de sa flotte. Il ne s’agissait pas d’un virage stratégique, mais d’un achat de rupture, sans alignement réel avec le reste de la flotte moyen-courrier.
Depuis, le différend a été réglé à l’amiable en 2023, et les commandes Airbus réactivées. Le recentrage était donc attendu, d’autant que le programme MAX 10, encore non certifié, souffre de retards chroniques et d’un déficit de confiance.
Airbus A321neo : la pierre angulaire du réseau court et moyen-courrier de Qatar Airways.
La décision de recentrage autour de l’Airbus A321neo confirme une stratégie plus cohérente pour Qatar Airways :
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50 appareils sont désormais en commande (40 A321neo et 10 A321LR), contre une trentaine de monocouloirs en flotte aujourd’hui.
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Ces appareils permettront une montée en gamme cabine, certains étant équipés de sièges-lits en Business.
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L’autonomie accrue de la version A321LR ouvre de nouvelles routes moyen-courrier vers l’Afrique, l’Europe de l’Est ou l’Asie du Sud-Est sans escale.
Le 737 MAX 10, plus contraint en termes de performances au décollage dans les conditions climatiques de Doha, n’offrait pas la même souplesse opérationnelle, ni la même densité cabine potentielle.
Une sortie du MAX en douceur et sans pénalité ?
L’annulation de la commande du MAX 10 s’inscrit dans le cadre de l’accord global annoncé récemment entre Qatar Airways et Boeing, comprenant jusqu’à 210 gros-porteurs, mêlant 787-9, 787-10 et 777X. En intégrant la rupture de commande dans cette enveloppe globale, Qatar Airways évite une sortie frontale avec Boeing, et montre qu’elle reste un client stratégique du constructeur américain, tout en réaffirmant son attachement à Airbus pour les monocouloirs.
Par ailleurs, les quelques Boeing 737 MAX 8 actuellement exploités par Qatar Airways devraient eux aussi quitter progressivement la flotte. Ces appareils, initialement destinés à la compagnie russe S7 Airlines (qui n’a pas pu les réceptionner en raison des sanctions), avaient été introduits par opportunité, non par choix structurant.
Conclusion.
L’annulation de la commande de Boeing 737 MAX 10 par Qatar Airways confirme une vérité industrielle : la cohérence flotte l’emporte toujours sur les bras de fer commerciaux. Après avoir brièvement flirté avec Boeing sur le segment monocouloir, Qatar Airways revient à ses fondamentaux, misant sur l’A321neo pour articuler l’expansion de son réseau régional et densifier ses capacités sur certaines routes à fort potentiel.
Et vous, pensez-vous que le 737 MAX 10 peut encore séduire d’autres compagnies du Golfe malgré ses retards ?
Julien.
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