Si l’on constate un retour à normale à l’aéroport international de Hong Kong après deux jours consécutifs d’annulation de vols, Cathay Pacific est aujourd’hui secouée en interne par un inattendu changement de direction. En effet, Rupert Hogg, le directeur général de la compagnie aérienne a présenté sa démission. Celle-ci s’accompagne de celle du numéro 3 de Cathay Pacific, Paul Loo, que nous avions eu l’occasion de rencontrer lors de la livraison du premier Airbus A350-1000 à Toulouse.
Démissions.
L’annonce a été publiée aujourd’hui par le South China Morning Post.
En effet, Cathay Pacific a accepté ce matin la démission de son directeur général, Rupert Hogg, et celle de son directeur de la clientèle et des affaires commerciales, Paul Loo.
Ces derniers ont immédiatement et respectivement été remplacés par Augustus Tang et Ronald Lam.
Augustus Tang est un transfuge de SWIRE, le conglomérat hongkongais et actuel principal actionnaire de Cathay Pacific (à hauteur de près de 45% du capital). C’est simple, le logo est présent sur tous les appareils de la compagnie aérienne.
Les tensions viennent de Pékin.
En effet, le gouvernement central reproche à certains employés de la compagnie aérienne d’avoir pris part ou d’avoir soutenu les manifestations prodémocratiques. Dans un mémo daté du début de cette semaine, Rupert Hogg avait d’ailleurs menacé ses salariés de sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au renvoi si leur soutien ou leur participation envers le mouvement était avéré.
Quatre employés avaient, jusqu’à présent, été licenciés et un pilote avait été suspendu.
Rupert Hogg et Paul Loo assument à eux deux l’entière responsabilité des actes de leurs employés afin de justifier leur démission.
« J’ai eu l’honneur de diriger le groupe Cathay Pacific au cours des trois dernières années. Je suis confiant dans l’avenir de Hong Kong en tant que plaque tournante de l’aviation en Asie. Cependant, ces semaines ont été difficiles pour la compagnie aérienne et il est juste que Paul et moi prenions nos responsabilités en tant que dirigeants de la compagnie. » – Rupert Hogg, directeur général de Cathay Pacific.
Mais l’implication, malgré elle, de la direction de Cathay Pacific dans ce mouvement ne s’arrêtera pas avec ces deux démissions.
En effet, à partir du dimanche 18 août 2019, alors que Hong Kong se prépare à de nouvelles manifestations ce week-end, Cathay Pacific devra désormais fournir à la Direction générale de l’aviation chinoise les noms des personnels navigants commerciaux et techniques à bord des avions à destination de la Chine ou traversant l’espace aérien chinois.
Par ailleurs, les salariés reconnus par Pékin comme ayant soutenu ou participé aux manifestations ne seront pas autorisés à bord des vols concernés.
Dépendante de la Chine, Cathay Pacific a annoncé qu’elle se conformerait aux exigences du gouvernement central chinois.
John Slosar, le Président de la compagnie aérienne basée à Hong Kong, a quant à lui insisté sur la nécessité de rétablir la confiance perdue. Il faut dire que ce changement de direction intervient après deux années financièrement compliquées pour Cathay Pacific.
« Rupert Hogg et son équipe ont exécuté un projet de transformation triennale, qui a joué un rôle important dans le relèvement de Cathay Pacific et constitue une base solide pour le développement futur. Cependant, les récents événements ont remis en question l’engagement de Cathay Pacific en matière de sécurité des vols et mis notre réputation et notre marque sous pression. C’est regrettable, car nous avons toujours fait de la sécurité notre priorité absolue. Nous pensons donc qu’il est temps de mettre en place une nouvelle équipe de direction capable de rétablir la confiance et de conduire la compagnie aérienne vers de nouveaux sommets. Cathay Pacific est engagée pleinement envers Hong Kong en vertu du principe de « Un pays, deux systèmes », consacré par la Loi fondamentale chinoise. Nous sommes confiants en l’avenir radieux de Hong Kong. » – John Slosar, Président de Cathay Pacific.
Après avoir plongé en début de semaine, le cours en bourse de l’action de Cathay Pacific reprenait ce soir quelques petites couleurs après avoir été menacé de boycott par les chinois.
Conclusion.
À titre tout à fait personnel, j’avais rencontré et échangé avec Paul Loo, le désormais ex-directeur de la clientèle et des affaires commerciales de Cathay Pacific. Indépendamment de toute prise de position sur ce sujet, il s’agissait d’une personne très engagée pour sa compagnie, ayant à coeur l’expérience vécue par ses clients au sol et à bord des avions. Ses équipes et lui avaient notamment été à l’initiative de nombreux projets en cours afin de faire renaître le prestige de la compagnie aérienne de Hong Kong.
Avec l’arrivée de Augustus Tang et Ronald Lam, c’est la première fois que Cathay Pacific nomme à sa tête (numéros 2 et 3 du comité exécutif) deux chinois. L’objectif premier étant assurément de contenter Pékin, les actionnaires de la compagnie aérienne et l’opinion publique.
Deux fusibles viennent de sauter.
C’est dommage.
Tyler.