On parle d’elle comme si elle appartenait au passé. Mais c’était sans compter sur la pugnacité de la compagnie aérienne d’Abu Dhabi qui, il faut le reconnaître, vie en ce moment des heures sombres. Etihad Airways a perdu de l’argent. Beaucoup d’argent. Ainsi, en 2017, la compagnie aérienne affichait un déficit de plus d’1,5 milliards de dollars (notamment en raison d’investissement malheureux – mais pas que – que ce soit chez Alitalia ou Air Berlin).
Etihad la combative ?
La compagnie aérienne a tout d’abord cherché à réduire ses coûts.
Depuis quelques mois maintenant, un long processus s’est engagé pour à la fois rationaliser les dépenses mais également pour faire rentrer de l’argent dans les caisses vides comme notamment la vente d’accès salon, la réduction de services proposés au sol et à bord, la fermeture de nombreuses routes déficitaires, …
De plus, la situation semblait ne pas s’améliorer lorsqu’Etihad laissait sous-entendre qu’elle ne disposait plus des fonds nécessaires pour lui permettre de prendre livraison de ses nouveaux appareils Airbus et Boeing actuellement en commande. La compagnie aérienne aurait même cherché des fonds (1 milliard tout de même) auprès de banques locales afin d’assurer, au moins, la livraison de ses futurs Dreamliner.
Mais Etihad veut résister. Et elle sait qu’elle doit se réinventer pour y parvenir.
Ainsi, hier, la compagnie aérienne d’Abu Dhabi a annoncé une restructuration en profondeur de son modèle économique mais également un changement de direction.
Une nouvelle direction pour Etihad.
Le Groupe Etihad Airways demeurera dirigé par son Président-directeur général, Tony Duglas, nommé à ce poste il y a plusieurs mois de cela, en remplacement de James Hogan.
En revanche, Peter Baumgartner, nommé Président-directeur général d’Etihad (la compagnie aérienne) en 2016, devient désormais le principal conseiller stratégique du dirigeant du Groupe. Il aura la charge du développement et de la gestion des partenariats et des innovations de la compagnie aérienne.
Ce sont 7 divisions qui verront désormais le jour chez Etihad afin de rationaliser son fonctionnement :
- opérationnelle
- commerciale
- maintenance (dont les réparations et les révisions des appareils)
- ressources humaines
- finances
- support
- transformation
Les activités recentrées autour d’Abu Dhabi.
Etihad reconnait avoir échoué là où Emirates et Qatar Airways ont excellé : faire transiter les passagers à Dubaï ou à Doha afin de les emmener vers leurs destinations finales. Si la stratégie du hub semble avoir parfaitement fonctionné pour la compagnie dubaïote ou la compagnie qatarie, Etihad peine à s’en sortir. Il faut dire qu’Abu Dhabi n’est qu’à une heure de route de Dubaï.
Le slogan « From Abu Dhabi to the world » va perdre de ton éclat puisque Etihad va désormais recentrer ses activités sur Abu Dhabi plutôt que de n’en faire qu’un point de transit vers le monde. La compagnie aérienne lui préfèrera sans doute à terme l’expression « From the world to Abu Dhabi » !
Pour parvenir à cet objectif, Abu Dhabi va devoir attirer à elle une clientèle de voyageurs attirés par la destination. L’émirat mise beaucoup sur le tourisme ; nous l’avons vu récemment avec, par exemple, l’inauguration du Louvre local.
Bien entendu, la compagnie aérienne ne cessera pas de vendre des billets au départ de Paris et à destination de Tokyo via son émirat. En effet, Etihad semble avoir coupé juste. Ces derniers temps, les fermetures de routes se sont enchaînées à un rythme effréné avec pour objectif de réduire les pertes.
En revanche, la compagnie aérienne n’aura plus besoin de tous les appareils qu’elle a commandé sous une ère précédente. Son appétit d’avions, pour concurrencer Emirates et Qatar Airways sans doute, va se calmer dans les prochains mois. La compagnie aérienne affirme déjà être en négociation avec l’avionneur européen et l’avionneur américain. Nous assisterons sans doute prochainement à l’annulation en série de commandes. Il est également possible qu’Etihad en profite pour se passer d’une part non négligeable de son staff (rappelez-vous, récemment, on a assisté à un transfert temporaire de pilote d’Etihad à Emirates) compte tenu des ajustements dans le programme de vol.
Etihad Partners vs. une nouvelle stratégie d’alliance ?
Il y a tout juste un an, nous vous précisions qu’Etihad Partners avait (déjà) du plomb dans l’aile.
Aujourd’hui, cette alliance – qui se voulait concurrente des trois plus grandes alliances mondiales que sont oneworld, Skyteam et Star Alliance – a toutes les caractéristiques d’une coquille vide, délaissée par son fondateur.
La nomination de l’ancien Président-directeur général d’Etihad (la compagnie) au poste de conseiller stratégique en charge des partenariat apportera sans doute un souffle nouveau à la compagnie aérienne. En effet, celle-ci ayant fait le choix de se recentrer sur Abu Dhabi et sur des routes rentables, il devra désormais compter sur un puissant réseau de partenaires internationaux pour poursuivre ses opérations.
Rejoindra t-elle l’une des trois alliances ? Impossible.
Et ce n’est pas qu’une question d’égo. Afin de rejoindre une alliance, les autres compagnies aériennes membres de celle-ci doivent donner leur approbation à l’unanimité. Avec Delta chez Skyteam, United chez Star Alliance et American Airlines chez oneworld (sans oublier sa grande rivale Qatar Airways), Etihad n’a aucune chance de rejoindre les rangs de ces alliances traditionnelles qu’elle a longtemps cherché à concurrencer. Même si elle le désirait.
La tâche ne sera donc pas simple pour Peter Baumgartner. Il devra rivaliser d’inventivité afin de permettre à Etihad de sortir la tête de l’eau, rapidement.
Conclusion.
L’avenir demeure complexe pour la compagnie aérienne d’Abu Dhabi. Si l’Émirat a souhaité disposer de sa propre compagnie aérienne, rivaliser avec Emirates et Qatar Airways dans la région n’est pas chose aisée.
Le fait de voir une compagnie s’enliser est toujours triste, d’autant plus lorsque l’on sait qu’elle peut encore offrir de jolies choses. Je ne sais pas si le fait de miser sur Abu Dhabi est la solution à tous les maux d’Etihad, mais il faut tenter le tout pour le tout. Avec un puissant réseau de partenaire, Etihad devrait pouvoir sortir la tête de l’eau.
Finalement, le plus compliqué sera sans doute de mettre un mouchoir sur sa fierté ! 😉
Tyler.