Avec les années, on apprend à ne plus prendre pour argent comptant les informations qu’on nous donne. Il n’a jamais été, n’est pas et ne sera jamais dans l’intérêt d’un acteur économique, quel qu’il soit, d’être parfaitement honnête si les données communiquées peuvent le desservir (et c’est compréhensible : chacun défend sa paroisse). Ainsi, quand Air France nous soutenait mordicus que le réaménagement des Airbus A380 était bel et bien à l’étude, nous prenions plutôt le parti de croire les sources internes qui nous affirmaient le contraire. Bien nous en a pris puisque l’avenir nous a donné raison à tel point que, coronavirus aidant, ces avions ont déjà quitté la flotte tricolore.
L’an passé, sensiblement à la même période, et conformément aux indiscrétions que nous avions reçu, nous nous sommes posés la question du maintien du produit La Première chez Air France. Inutile de dire, qu’une fois de plus, nous avons essuyé autant de remontrances que de quolibets des ardents défenseurs de notre bien aimée compagnie nationale.
Récemment, Catherine Villar, la Directrice de l’expérience client d’Air France, s’épanchait même dans les colonnes d’un jeune média à sa solde pour rappeler à quel point le produit de Première classe faisait partie intégrante de l’ADN de la compagnie aérienne.
Bien entendu, et parce que nous aimons profondément Air France, nous n’avons pas manqué de chahuter ses têtes « pensantes » quant à la piètre gestion qualitative de l’offre globale depuis la crise sanitaire qui touche le monde. Ainsi, ceux qui sont aujourd’hui en charge de satisfaire les passagers et de rendre la compagnie aérienne attractive aux yeux de indécis dans un univers fortement concurrentiel, considèrent que d’offrir des prestations Business à un client First, tout en lui faisant payer le prix de la First, peut se justifier par les problématiques sanitaires actuelles. Ce qui en dit tristement long sur leur méconnaissance …
Mais nous souhaitons aujourd’hui reprendre la réflexion que nous avions entamé l’an passé sur l’avenir du produit La Première et vous apporter des informations complémentaires à la lumière de nouvelles indiscrétions relatives à ce produit d’exception. Et parce que, par expérience, il est plus sage de prendre les devants : ne vous fiez pas aux commentaires indignés de ceux (souvent des employés) qui monteront au créneau, notamment sur les réseaux sociaux, pour discréditer nos propos. Le passé a montré que nos informations étaient toujours justes (Dreamliner, nouveaux sièges, rationalisation de la flotte, retrait des Airbus A380, …).
Quel avenir immédiat pour le produit La Première d’Air France ?
Après nous avoir occupé pendant des mois en nous faisant croire que le réaménagement des Airbus A380 était à l’étude, ces derniers ont officiellement quitté la flotte de la compagnie aérienne tricolore. Ce retrait, anticipé par la crise du coronavirus eu égard aux prévisions initiales, ampute lourdement l’offre en siège de Première classe.
Jusqu’à présent, la cabine La Première était disponible sur :
- 10 Airbus A380
- 19 Boeing 777-300ER
Les Airbus A380 offraient 9 sièges par avion, soit un total de 90 sièges. Les Boeing 777-300ER permettent, quant à eux, d’accueillir jusqu’à 4 passagers par avion, soit un total de 76 sièges. En tout, avant le départ du super jumbo de la flotte, le produit La Première comptait 166 sièges.
Désormais, avec 19 avions et 76 sièges disponibles, le choix aurait été fait de maintenir la Première classe sur un nombre très restreint de destinations. Seules quelques destinations d’importance seraient conservées à l’instar de New York, Los Angeles, Washington, Singapour et Hong Kong. Par ailleurs, Shanghai et Pékin pourraient également faire l’objet d’un maintien du produit La Première.
Compte tenu de la taille actuelle de la flotte, seules 8 à 10 destinations seraient concernées par la Première classe d’Air France. C’est du moins ce que permettraient, au maximum, les 19 appareils équipés du produit (et ce, sans machine de réserve en cas d’aléa technique).
Ces modifications, apportées au réseau du produit La Première, soulèvent deux questions principales : le maintien du salon de Première classe et le service proposé aux voyageurs, désormais peu nombreux.
Le maintien du salon La Première.
Aujourd’hui, chez Air France, il y aurait une véritable question sur le maintien du salon La Première tel qu’il est et qui deviendrait, pour la compagnie aérienne, un centre de pertes colossal.
Nous avons eu l’occasion de vous présenter l’offre à de nombreuses reprises sur The Travelers Club : restaurant Alain Ducasse, soins Biologique Recherche, personnel dédié en nombre … il s’agit d’un vrai havre de paix pour les clients qui pénètrent en ces lieux.
La question ne serait, pour l’heure, pas encore tranchée en interne mais l’idée d’avoir une zone réservée aux passagers La Première au sein d’un futur grand salon unique serait à l’étude. Cette nouveauté, si elle était adoptée par Air France, replacerait la situation à un niveau d’avant inauguration du salon dédié et serait, incontestablement, un voile jeté sur l’image haut de gamme du produit.
Par ailleurs, si cette zone réservée était finalement actée, la compagnie aérienne y offrirait à ses clients des prestations dédiées. Aucun détail complémentaire quant à l’offre spécifique n’a filtré (nous ne savons pas non plus si elle a ne serait-ce qu’été imaginé) mais cet adjectif, en langage Air France, est souvent synonyme du pire …
Le service La Première.
Là encore, pour les amoureux de l’expérience client, mieux vaut avoir le coeur bien accroché.
Afin d’éviter des pertes astronomiques (il faut dire qu’avec 76 sièges contre 166 par le passé, la donne n’est plus la même), des idées loufoques circuleraient parmi les têtes pensantes d’Air France.
Si on envisage, bien sûr, un retour aux prestations d’avant crise sanitaire provoquée par le coronavirus, on réfléchirait aussi, au retour des prestations proposées en 1994 au sein de l’Espace 180. Pour les néophytes, ce produit était l’ancêtre de La Première d’Air France et l’offre globale était bien loin de ce qu’un passager pourrait aujourd’hui espérer dans cette cabine de voyage.
Pour résumer, si cette option était retenue par Air France, les clients La Première se verraient offrir le même service en Première classe qu’en Business avec, cependant, des compléments en First. Ces compléments sont chiches et se résumeraient à un service de caviar en pré-entrée et un ballotin de chocolat après le dessert.
Bien entendu, et rassurons-nous, il s’agit d’une aberration pour bien des cadres d’Air France.
Néanmoins, pour d’autres que la décence nous impose de ne pas citer, cette idée devrait pouvoir faire son chemin arguant notamment le fait que les prestations La Première ne seraient consommées que par les clients surclassés ou ceux qui ont payé leur billet en miles, les payant, eux, ne consommeraient presque rien.
On serait bien loin de l’image d’excellence propulsée par la montée en gamme et portée, à l’époque, par Catherine Betsch puis par Marine Gall et Alexandre de Juniac.
Quel avenir à long terme pour le produit La Première d’Air France ?
Là encore, la palme de la mauvaise foi reviendrait incontestablement à Catherine Villar. Dans sa récente interview donnée dans les colonnes de Gate 7, la Directrice de l’expérience client d’Air France défend bec et ongle la viabilité de son produit La Première.
« La marque Air France ne peut pas se priver de La Première qui fait partie de son ADN et de son patrimoine. Air France n’a aucune intention de supprimer son service La Première. La suite La Première est aujourd’hui disponible sur 19 de nos Boeing 777 et nous continuons de travailler sur l’offre La Première au sein de la compagnie pour le futur. » – Catherine Villar, interview réalisée par Gate 7.
Pourtant, contrairement a ce qui est affirmé haut et fort, et dans un futur pas si lointain, le produit La Première pourrait bien disparaître.
Les Boeing 777-300ER équipés de la cabine de Première classe sont d’un âge entre 11 et 15 ans. Ils ont ainsi vocation à rester en flotte encore pendant une dizaine d’année.
En revanche, Air France n’entendrait pas réinvestir sur son produit La Première à bord de ces avions. Le siège actuel, dont l’usure prématuré est évidente et flagrante, devra tenir « coûte que coûte » (justement, non …) eu égard au prix ahurissant payé, à l’unité, à l’origine par la compagnie aérienne.
Ces avions, nous le savons, seront remplacés par des Airbus A350 qui ne sont pas équipés d’une cabine La Première. Par ailleurs, le plan de flotte ne prévoirait pas, pour l’heure, d’équipement en sièges de Première classe pour les commandes en cours et à venir.
En l’état actuel de la situation, le produit La Première vivrait donc sa dernière décennie.
Conclusion.
Actuellement, compte tenu de la crise sanitaire provoquée par le coronavirus, Air France a stoppé le service de prestations La Première décentes, jusqu’à nouvel ordre. Plus de salon dédié au sol, un service très décevant en vol. La compagnie aérienne utilise allègrement l’argument de l’absence de voyageurs First (moins de 10 clients par jour) pour justifier ce service fortement dégradé. À titre d’exemple, en juin 2020, le panier deuxième prestation en La Première et en Business était identique à celui servi en Economy. En compensation, Air France offrirait cependant un accès aux zones Ultimate et un fort crédit en miles à ses clients de Première classe.
Les projets d’avenir, qui ne seraient encore qu’à l’état d’études dans les rangs d’Air France, font froid dans le dos. La concrétisation de ces modifications viendrait dénaturer le produit La Première qui perdrait alors toute sa superbe.
Espérons qu’ils se réveillent !
Tyler.